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Quand les archives et les livres se portent au secours de Palmyre, la perle du désert!

En marge de la signature d’une convention entre l’Alliance internationale pour la protection du patrimoine dans les zones de conflits (ALIPH) et le projet Collart-Palmyre de l’Institut d’archéologie et des sciences de l’antiquité (IASA), la responsable de la collection des sciences de l’Antiquité vous propose une sélection de documents sur la ville de Palmyre en Syrie. Découvrez cette sélection thématique dans le catalogue Renouvaud.

Quels secours des photographies ou des films peuvent-ils procurer à notre patrimoine matériel (et mémoriel) ? petit parcours initiatique…

Palmyre

Paul Collart a 52 ans lorsqu’il découvre Palmyre au cours d’un voyage au Proche Orient. En 1953, il est envoyé par l’UNESCO afin de dresser l’inventaire des biens culturels de la Syrie et du Liban. Et de 1954 à 1956, il organise la première mission archéologique exclusivement suisse conduite sur un sol étranger. Trois campagnes, suivies de vérifications en 1966, permettent de dégager le sanctuaire de Ballshamîn, un temple du IIe siècle, à Palmyre.

Né en 1902 dans une famille d’architectes genevois, Paul Collart s’intéresse à l’Antiquité et suit des études classiques à l’Université de Genève. Membre étranger de l’Ecole française d’Athènes dès 1926, il parcourt alors la Grèce et toute la région muni de son appareil photographique : il ramènera de ces différents périples près de 4000 clichés. Il crée ainsi une mémoire photographique du monde antique. Ses images rigoureuses et détaillées des vestiges archéologiques lui serviront tant à illustrer ses publications que les cours qu’il donnera comme professeur d’Histoire ancienne à l’Université de Lausanne puis à l’Université de Genève.

Palmyre est une étape importante dans son parcours. Oasis du désert de Syrie, cette ville, marquée par de grandes voies à colonnades, des temples et des tombeaux, connait son apogée au IIe et IIIe siècles de notre ère. Un de ses temples principaux, Baalshamîn, dédié au « Seigneur des cieux », est achevé en 130 et comporte une façade à six colonnes.

Dans sa logique d’anéantissement des sites préislamiques, Daech détruit le temple en août 2015. Seuls les traces photographiques et les rapports de fouilles nous permettent encore de restituer ce fastueux visage de celle qu’on nomme la perle du désert, Palmyre.

Angkor-Vat

Henri Stierlin a 38 ans lorsqu’il découvre le temple d’Angkor-Vat lors d’un reportage qu’il réalise pour la Télévision suisse romande au Cambodge, en 1966, en compagnie de Pierre Barde.

Né en 1928 à Alexandrie, Henri Stierlin est un historien de l’art et de l’architecture. Après des études classiques en latin et grec, ainsi qu’une licence en droit, il devient journaliste dans la presse écrite, puis passe à la radio, et enfin à la télévision. C’est pour cette dernière qu’il crée, avec Pierre Barde, les séries documentaires L’homme à la recherche de son passé, ce qui va l’amener à parcourir le monde, caméra à la main, pour réaliser 45 émissions de 30 minutes : l’Egypte pharaonique, le Mexique précolombien, la Grèce antique, l’Iran achéménide et islamique, la Turquie gréco-romaine, byzantine et ottomane, la Syrie antique, la Jordanie antique, l’Espagne romaine et médiévale, les Etrusques, l’Inde bouddhique, hindouiste et moghole, et les Khmers d’Angkor.

Le Cambodge est leur dernière expédition. Et les bas-reliefs du temple d’Angkor-Vat sont patiemment filmés : le travelling effectué nous donne même l’impression de voir les danseuses des bas-reliefs se mouvoir gracieusement…

Angkor-Vat est le plus grand des temples du complexe monumental d’Angkor au Cambodge. Il fut construit par Suryavarman II au début du XIIe siècle. Par un savant jeu d’optique, ses trois niveaux semblent d’un seul tenant. Ses douves symbolisent l’Océan primordial, d’où émergent cinq montagnes (tours du temple), séjours sacrés des dieux. Initialement hindou et dédié à Vishnou, il devient bouddhiste et reste ainsi un important site religieux depuis sa fondation.

Le pays est confronté, à partir de 1967-1968, à une insurrection fomentée par les Khmers rouges. Cependant, aucun combat n’a lieu sur le site même d’Angkor, alors que la ligne de démarcation entre les ennemis en est proche, et le site d’Angkor-Vat est préservé… à l’exception notable de statues de Bouddha : il faut y voir l’effet de l’hostilité des Khmers rouges vis-à-vis du bouddhisme contemporain. Du coup, le film de Stierlin garde une trace des bas-reliefs des bouddhas d’Angkor-Vat. La pellicule sauve une fois encore notre mémoire.

Et vous, quel âge aviez-vous lorsque vous visitiez des vestiges depuis disparus ?

Suivez un reportage de 2021 sur Angkor-Vat: Le site cambodgien d’Angkor menacé par un gigantesque parc d’attraction

Evelyne Barman Crotti
Responsable de la collection des sciences de l’Antiquité, BCUL site Unithèque