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« Travelling » sur le site de Scriptorium

La revue de cinéma lausannoise est maintenant disponible en ligne !

« Pourquoi « TRAVELLING J  » ? Parce qu’il n’existait pas. S’il y a en Suisse plusieurs revues cinématographiques, aucune n’est rédigée en français spécialement pour les jeunes.
Art populaire, le cinéma touche toutes les couches de la société. Mais la culture cinématographique ?
« Travelling J » : voilà le guide objectif et jeune qu’il vous faut !
[…] A notre époque, on ne peut plus se permettre d’ignorer le cinéma.
[…] Et nous voulons prouver que le cinéma, ce n’est pas Fernandel et Darry Cowl, mais Bergman et Welles, par exemple. Vous lirez aussi des reportages sur le cinéma suisse. »
(« Zoom », Travelling Jeunesse, no 1, octobre 1963, p. 2)

La numérisation de la revue lausannoise Travelling (1963-1980) s’inscrit dans le cadre du programme de la BCU Lausanne visant à offrir un accès en ligne au contenu historique des principaux titres de la presse périodique éditée dans le canton de Vaud. Il est également en phase avec la mission de préservation et de mise en valeur des fonds patrimoniaux dont la BCU Lausanne a la garde.  La réalisation de ce projet a bénéficié du soutien précieux de la Cinémathèque suisse.

La revue Travelling est une source importante pour l’étude du cinéma et sa réception critique. Elle comprend des chroniques et des articles de fond sur des thématiques diverses. Il y est question de réalisateur·trice·s, de festivals et de cinématograhies nationales. La revue contient également des entretiens et des critiques de films, et fait la part belle au cinéma suisse (films, événements, états des lieux et problématiques). Elle paraît entre 2 et 5 fois par an et connaît différents titres de couverture au cours de son existence : Travelling Jeunesse, Travelling J., Travelling J Cinéma – TV, Travelling J, Travelling, Travelling. Revue de cinéma, et enfin, Travelling. Cinémathèque suisse.

Créée en 1963 par le Lausannois Marcel Leiser, qui la dirigera jusqu’en 1975, elle est éditée par le Groupe d’Étude du Film (GEF), association à but non lucratif créée dans ce seul but et rassemblant une équipe de bénévoles. Marcel Leiser n’est alors âgé que de 18 ans et se considère comme sérieusement atteint du virus de la cinéphilie : « Fasciné par ce moyen de communication audiovisuel aux émotions si magiques, je me devais, comme d’autres, et tel un petit missionnaire culturel, prêcher la bonne parole de ce septième art ». (Roland Cosandey, Un dossier Marcel Leiser, « Documents de cinéma », Cinémathèque suisse).

Très impressionné par les longs et lents mouvements de caméra dans Nuit et Brouillard et L’année dernière à Marienbad, il baptise la revue « Travelling », en hommage à Alain Resnais. En raison de ses nombreuses contributions rédactionnelles, il utilisera souvent des pseudonymes (Lecram Resiel, Alexis Duval, Aloïs Duval, etc.). Il deviendra journaliste et cinéaste, et sera notamment responsable de la rubrique cinéma de La Nouvelle Revue de Lausanne de 1966 à 1975.

Longtemps réalisé de manière artisanale par de jeunes passionnés, ce fanzine de cinéma rassemble une équipe de rédacteurs réguliers ou occasionnels, parmi lesquels on retrouve entre autres les futurs cinéastes Marcel Schüpbach et Jean-François Amiguet, la future responsable du documentaire à la TSI Luisella Realini, François Albera, futur titulaire de la chaire de cinéma de l’Université de Lausanne, et Hervé Dumont, futur directeur de la Cinémathèque suisse.

Au fil des numéros, le ton se fait plus engagé :

« Le temps où nous pouvions limiter nos ambitions à tenir le rôle d’un simple bulletin d’information destiné aux jeunes cinéphiles est révolu. « Travelling j » se doit de devenir un organe de combat. […] Le dogmatisme ne trouvera pas de place en nos pages. » (Marcel Leiser et François Pasche, Travelling J, no 11, hiver 1966, pp. 16-17).

Ou encore, à propos du cinéma suisse :

« […] Le public ne suit pas, traumatisé par la radio-yéyé, la tv des feuilletons et des émissions de jeux (dans le style, affligeant, d’ « interneiges »), les hebdomadaires à vocation première de supports publicitaires et le cinéma-spectacle (mauvais spectacle, bien sûr), le tout allant de pair avec un mouvement progressif d’américanisation, limitée à ce que les u.s.a ont de négatif. » (Marcel Leiser et François Pasche, Travelling J, no 11, hiver 1966, pp. 12-13).

En automne 1975, dès son numéro monographique triple (44/45/46), la revue est reprise et poursuivie dans une nouvelle perspective par la Cinémathèque suisse, grâce à l’entremise d’André Chevailler, collaborateur de la Cinémathèque. Elle cesse de paraître en 1980.

En guise de teaser pour donner envie à notre public cinéphile d’aller découvrir Travelling, la critique du film Une femme mariée, de Jean-Luc Godard (1964) :

« En dehors du fait qu’il est difficile de se montrer impartial à l’égard des films de godard (pour ma part, j’en ferais volontiers l’apologie), il faut reconnaître dans UNE FEMME MARIÉE un film intéressant que godardomanes et godardophiles se doivent de voir et de discuter ensuite, s’ils en sont capables. […] Mise en scène : exploration de nouvelles formes du langage, regard d’ethnologue sur un monde en perpétuelle contestation et duquel semble se dégager une morale nouvelle. » (François Pasche, Travelling J, no 8, printemps 1965, pp. 75-76).

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