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Des notes pleines d’images (5/5) : Paysages sonores

Dans l’article consacré à la musique descriptive dans les poèmes symphoniques, nous avons découvert que la nature est une source inépuisable d’inspiration pour les compositeur·trices. Ses bruits, ses rythmes, ses mystères… le vent, la pluie, les oiseaux, les tempêtes, mais aussi le silence d’un paysage enneigé… tout trouve un écho dans la musique.

Au 18e siècle, Vivaldi compose les célèbres Quatre Saisons, véritable fresque descriptive où la musique devient paysage sonore. Un siècle plus tard, Beethoven, dans sa 6e Symphonie dite « Pastorale », nous promène à la campagne, jusqu’à l’orage qui éclate en plein orchestre. Ce lien entre musique et nature traverse les siècles. Chez Mahler, les paysages alpins résonnent dans les interludes pastoraux. Chez Debussy, la Mer devient lumière, mystère, mouvement, profondeur – non pas l’eau qu’on voit, mais celle qu’on ressent. Chez Messiaen, les oiseaux ne sont plus imités, ils sont présents. Le compositeur les transcrit avec une précision presque scientifique. La nature n’est pas seulement imitée, elle est traduite, sublimée, réinventée à travers les sons.

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Et puis, il existe une autre manière encore plus subtile d’évoquer la nature : par l’atmosphère. Certaines œuvres ne racontent rien de précis, mais suggèrent tout : la nuit, la lumière, le silence, le rêve. C’est le cas des nocturnes, dont Chopin est le maître incontesté. Ici, pas de vent, pas d’oiseaux, pas de tonnerre. Mais une nuit intérieure, une ambiance suspendue. Chopin ne décrit pas la nuit, il nous y plonge. Ses nocturnes sont des tableaux sans sujet, mais où chaque note évoque mille choses.

Plus tard, Fauré, Debussy, Field, prolongeront cette veine poétique, cette forme plus intérieure de musique descriptive, impressionniste avant l’heure.

Depuis le chant des madrigaux jusqu’aux musiques de film, en passant par les poèmes symphoniques, les sons de la nature et les murmures de la nuit, la musique descriptive nous invite à écouter autrement, avec l’imagination grande ouverte. Elle est un langage à part entière, un art de faire voir sans montrer, de faire ressentir sans dire. Elle transforme les notes en images, les sons en souvenirs… un simple motif en personnage, une suite d’accords en orage, un silence en souffle… avec une puissance évocatrice incroyable. Elle rend le visible audible, et l’émotion palpable.

À travers la musique descriptive, nous découvrons que la musique n’est pas seulement à entendre, mais elle est aussi à voir, à ressentir, à imaginer.
Alors la prochaine fois que vous écouterez une œuvre, demandez-vous :
« Et si cette musique me racontait quelque chose ? » Fermez les yeux… écoutez… vous verrez…

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